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L'EPFL fêtera ses cinquante ans en 2019

Du bon usage d’une Ecole polytechnique fédérale

par Martin Vetterli, Président de l'EPFL

Il y a un mois, nous avons fêté la cuvée 2018 des diplômés de l’EPFL. En tout, 1043 diplômées et diplômés couvrant l’architecture, les sciences de base, de la vie et de l’ingénieur, qui nourriront notre société et notre économie. Elles ou ils iront dans une PME, ou une grande entreprise, fonderont une start-up, ou deviendront chercheurs ou artistes.

Parmi ses consœurs, en Suisse et de par le monde, l’EPFL est une adolescente, elle fêtera ses 50 ans l’année prochaine. En plus d’être jeune, l’EPFL se positionne sur un créneau particulier. Elle n’est pas une université humboldtienne, elle n’est plus une école d’ingénieurs classique, mais bien un institute of technologytravaillant à l’intersection des sciences et des technologies qui transforment le monde. Ceci est une opportunité et une responsabilité dont nous prenons la pleine mesure.

L’EPFL participe, avec les Universités de Lausanne et Genève, à l’essor d’une région très dynamique. Les statistiques officielles montrent que si l’Arc lémanique compte 19% de la population et 18% du produit intérieur brut suisse, ses start-up lèvent 49% du capital-risque suisse et ses universités contribuent à plus de 34% de la production scientifique nationale. Au-delà de la production, l’impact de son activité académique est à la hauteur: ces dix dernières années, notre région a levé autant de bourses du Conseil européen de la recherche que l’agglomération zurichoise, et cela avec un financement de base moindre.

Recherche sur le cancer

Ces résultats ne sont pas le fruit du hasard. Les acteurs académiques et politiques de la Suisse romande ont su faire les réformes nécessaires, monter des collaborations clés et gérer intelligemment leurs ressources sans se disperser.

L’EPFL, comme seule haute école fédérale de Suisse occidentale, y joue un rôle moteur. Rappelons qu’elle a créé un parc de l’innovation sur son campus il y a vingt-cinq ans déjà, qu’elle a importé une culture nord-américaine d’université de recherche dès les années 1990, et qu’elle s’est muée en profondeur ces vingt dernières années, sous l’impulsion de mes prédécesseurs, dont je salue ici l’action.

Ce rôle, elle le joue en bonne connivence avec son environnement. Elle le démontre par sa volonté de collaboration, entre autres avec les institutions de la région. Je prends quelques exemples pour étayer mon propos: avec le CHUV et l’Unil, nous renforçons la recherche sur le cancer en faisait collaborer la clinique avec l’ingénierie au sein du centre Agora; avec sept hôpitaux et universités à Genève, Lausanne et Berne, nous mutualisons nos ressources dans l’initiative H2030 pour faire de la Suisse occidentale un leader dans la médecine personnalisée. Notre centre Learn d’innovation dans l’enseignement collabore étroitement avec plusieurs cantons, dont Vaud et le Valais, pour renforcer le numérique dans la formation primaire, secondaire et professionnelle. Enfin, dans des domaines clés comme la science des données et la sécurité informatique, nous avons lancé des centres de recherche et des programmes de formation avec nos partenaires naturels.

Révolution de l’intelligence artificielle

Ce rôle, l’EPFL le joue aussi par sa contribution à un écosystème unique, par l’émergence d’un hub d’innovation et de technologie autour de son campus principal à Lausanne mais aussi à Fribourg, Neuchâtel, en Valais et à Genève. Avec une recette identique: permettre l’éclosion et le développement de start-up innovantes et de collaborations industrielles.

Bien des synergies sont encore à développer, et l’EPFL s’attelle à les réaliser. Sont en discussion des collaborations dans des domaines à l’intersection de l’économie, du management et de la technologie, ou des sciences fondamentales, incluant l’informatique théorique, science clé du XXIe siècle pour la révolution de l’intelligence artificielle.

Pour réaliser son plein potentiel, la région a besoin du soutien de tous les acteurs; c’est ensemble et grâce à nos collaborations que nous pouvons renforcer notre impact. Mais cela doit aussi passer par une certaine prise de conscience à Berne et au-delà, car comme pour l’EPFL, le destin des sciences et des technologies en Suisse occidentale ne se joue pas au bord du Léman mais bien sur les rives de l’Aar, voire de la Limmat. Car la Suisse, même la Suisse alémanique, a besoin de cette région remuante, innovante, parfois un peu agaçante, mais tellement nécessaire !

Martin Vetterli

Source EPFL/Le Temps