Effectuer une recherche sur le site.

Merci pour le Chocolat

Chaque semaine, L'Illustré publie les chroniques de Joël Mesot, physicien de formation et président de l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich. Retrouvez-le sur Twitter: @Joel_Mesot

Jusqu’au XIXe siècle, déguster du chocolat signifiait réchauffer une pâte de cacao au goût amer et la consommer liquide. Puis, en 1875, Daniel Peter développa le chocolat au lait à Vevey en mélangeant le cacao avec du lait condensé. Peu de temps après, le Bernois Rodolphe Lindt remua la masse de chocolat dans ses machines pendant un week-end et inventa ainsi le conchage, un procédé qui donne au chocolat toute sa finesse. Grâce à de telles innovations, le chocolat suisse est devenu l’incarnation même de la qualité et du plaisir. Pâques et ses douceurs chocolatées approchent à grands pas. Des montagnes de lapins en chocolat de formes et de tailles diverses devraient être dévorées dans les jours à venir. Mais en Suisse, nous aimons le chocolat tous les jours de l’année: nous sommes en e et les champions d’Europe avec une consommation par habitant de 10,3 kg de chocolat par année. J’avoue que je suis un Suisse modèle dans ce domaine.

Bien sûr, je ne vous raconte pas cette histoire pour vous révéler mon penchant pour le chocolat, mais parce que je voudrais vous faire part des contributions de l’EPFZ pour améliorer ce produit traditionnel à base de cacao. Dans le passé, une couche blanc grisâtre appelée «blanchiment gras» se formait souvent sur le chocolat qui n’était pas stocké correctement. Au début des années 2000, des chercheurs de l’EPFZ ont résolu ce problème en se basant sur des expériences de diffraction de rayons X sur la cristallisation polymorphe du beurre de cacao menées à l’Institut Paul Scherrer. Autre exemple: si ces boules de chocolat rouge et noir d’un célèbre fabricant suisse fondent si agréablement sur la langue, c’est aussi grâce au savoir-faire de l’EPFZ. Aujourd’hui, les gens font de plus en plus attention à leur ligne, l’industrie doit donc chercher des solutions pour produire un chocolat qui a un goût délicieux sans être trop calorique. Les laboratoires de l’EPFZ travaillent sur cette quadrature du cercle en chocolat. L’astuce consiste à incorporer des gouttelettes d’eau ou des bulles de gaz dans le chocolat. Il en résulte une densité énergétique moindre par volume: une tablette de chocolat de la même taille contient donc moins de calories.

Après tout, il y a toujours des améliorations dans la production de chocolat. Elles n’ont pas toujours un effet direct sur la qualité du chocolat, mais elles permettent d’en optimiser la production. De telles améliorations renforcent la position concurrentielle de l’industrie chocolatière suisse sur le marché mondial. Sur base de cette idée, Erich Windhab, ingénieur alimentaire de l’EPFZ, a constitué, il y a vingt-cinq ans, le groupe de travail Chocolate Technology avec des entreprises industrielles et des PME. Au l des ans, ce groupe de travail a dé- posé 17 brevets, mené 28 projets de recherche et récolté des prix internationaux tels que le European FoodTec Award. Le chocolat suisse n’est donc pas seulement un produit haut de gamme, c’est aussi un produit de haute technologie, dont les exportations ont généré en 2018 près de 1 milliard de francs. Au fait, si vous faites une flexion des genoux pour chaque mention du mot «chocolat» dans le texte – 22 fois! –, vous avez brûlé (presque) assez de calories pour mériter une plaque de votre chocolat préféré. Pardon: 23 fois! 

Source : L'Illustré